Nous vous proposons ici quelques textes, extraits de différents ouvrages.
Cela met en avant les différents moments du développement de l’enfant.
Et ceci en lien avec sa capacité à voir des films.
Pour se faire une idée de ce qui est adapté à votre enfant, mieux vaut tenter de voir ce qu’il peut saisir. Un petit rappel théorique.
« À dix-huit mois, les représentations se combineront en pensées. C’est le début des jeux symboliques. À cet âge, les images perçues sur un écran se doivent de ressembler à ce que l’enfant connaît déjà. Les Télétubbies en sont un bon exemple. Les situations se répètent et varient légèrement, juste pour suggérer au petit spectateur de nouvelles combinaisons mentales.
Vers trois ans, l’image est intégrée « comme si ». Le langage se différencie, l’opposition se manifeste, ainsi que le cabotinage. Les films, très courts, doivent traduire des circonstances connues, avec des héros du même âge ou des animaux familiers.
Entre trois et quatre ans (début symbolisme), les « comme si » entrent dans les jeux. Un bout de ficelle et une boîte deviennent une voiture. La pensée se traduit par des explications très subjectives et teintées de magie. L’écran, la représentation d’animaux humanisés aide à évacuer les sentiments ambivalents que l’enfant éprouve à l’égard de ses parents. C’est aussi l’âge où des fictions risquent de provoquer des cauchemars pour lesquels la consolation des parents est réclamée à grands cris.
Avant l’âge de raison (sept ans), la pensée s’organise peu à peu de façon plus objective. Puis, les mots et les images s’associent, facilitant de nouvelles acquisitions. Par la mémorisation ou la répétition du « déjà connu », la pensée se développe, s’enrichit. L’anticipation procure un véritable plaisir de penser. À l’écran, l’enfant apprécie les séries où il retrouve ses héros préférés et prend plaisir à en collectionner les images. (Pokemon, Digimon.)
Durant la période de latence (entre environ la cinquième année et l’adolescence), l’enfant aime les histoires de héros respectueux des autres, qui combattent pour de bonnes causes (Robin de Bois, Mulan…) Il commence à jouer avec les mots et l’humour au second degré fait une timide apparition. Dans les films ou les séries, il exulte lorsque le scénario l’emmène hors de son quotidien, dans des espaces lointains ou des héros comme Kirikou, Mulan ou Pocahontas vivent des aventures exaltantes, mettent en relief de grands sentiments : la justice, l’amour, le bonheur… Les situations proposées peuvent être plus symboliques. » 1.
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Nous reprenons les étapes avec différents exemples.
LE BÉBÉ
« Le nourrisson prend plaisir aux échanges avec ceux qui l’entourent. Dans l’interaction, par les réponses à ses mimiques, et celles qu’il donne à son entourage, il expérimente aussi bien physiquement qu’émotionnellement le principe de cause à effet : il dialogue. Lorsque les expériences positives priment sur les mauvaises, elles font favorablement évoluer sa vision du monde extérieur. Dans tous les cas, elles resteront conservées comme références. (…)
Les dessins animés – comme Pingu -, qui s’adressent aux plus petits, tiennent en général compte de cette dimension relationnelle. À travers le lien parental, ils montrent des comportements et des états d’âme, reflets du milieu familial. Le dialogue succinct qui accompagne les images semble parfois simpliste aux parents. Cependant, très proche des verbalisations des petits, il favorise l’identification aux personnages. En écho à l’entourage familial, les images font trace dans sa mémoire, donnant à ses expériences vécues une dimension sociale. C’est sur cette construction autonome de soi, cette capacité à percevoir le monde, que l’enfant élaborera ses relations aux autres, s’en fera des représentations de plaisir ou de déplaisir. Rencontres et découvertes enrichissent le nombre des « possibles ». » 2.
« Vers huit mois, la coordination vision-préhension se met en place mais jusqu’à un an, environ, l’enfant traite l’image comme un objet réel. Par la suite, il fera la distinction. L’identification à son image correspond à un premier pas dans la conquête de son identité. Selon Lacan : La double identification de l’enfant à son corps et à son image introduit l’imaginaire.
Le MOI en exemple tiré des Télétubbies .….
Ces représentations de ce qu’il perçoit, l’enfant les conserve, les intériorise et peut s’en souvenir. À dix-huit mois, les représentations se combineront en pensées. C’est le début des jeux symboliques. À cet âge, les images perçues sur un écran se doivent de ressembler à ce que l’enfant connaît déjà. Les Télétubbies en sont un bon exemple. Les situations se répètent et varient légèrement, juste pour suggérer au petit spectateur de nouvelles combinaisons mentales. Vers trois ans, l’image est intégrée « comme si ».
L’âne Trotro et Mimi en exemple avec les deux images suivantes.
« Le plaisir du très jeune enfant vient, dans un premier temps, non pas de l’aventure du héros mais de sa présence permanente dans le dessin animé. Par leur identité stable, Petit Ours, Emilie, ou Mimi Cracra font la joie des petits, aussi bien en livres qu’en dessins animés. Cette permanence rassurante permet à l’enfant de s’intéresser à ce qui se passe sur l’écran. Son regard peut se promener sur l’image, ailleurs que sur la silhouette du héros, quoique sans le perdre de vue. » 4.
« (…) il est mis en évidence que lors d’un spectacle télévisé, des enfants de 2 à 3 ans peuvent mémoriser l’information sur l’état émotionnel du personnage ; mais ils ne s’en rappellent pas longtemps. Cela signifie peut-être aussi que ces enfants ne comprennent pas toujours quand les émotions servent à motiver les actions. Cependant, ils le font d’autant mieux qu’ils peuvent en parler librement, avec leurs propres mots pour les décrire. Autrement dit, le tout-petit perçoit les émotions des personnages, les vit lui-même dans une participation affective, mais n’est pas encore capable de leur donner un sens, faute de compréhension par le langage. » 5.
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À TROIS ANS
« Aux environs de trois ans, la vie imaginaire de l’enfant se développe intensément. À travers les jeux, il exprime à la fois ses propres émotions et celles qu’il attribue à ses proches. Tout au long de la période qui recouvre l’âge de l’école maternelle, les imitations, puis les fictions occupent une bonne partie de son espace ludique. Elles seront de plus en plus socialisées et symbolisées. Parallèlement à la mise en place de fictions où l’enfant vit sans danger des situations éprouvantes, l’intensité émotionnelle dans la vie réelle diminue, grâce à ces mécanismes de défense, véritables protections psychiques pour apaiser l’angoisse. » 6.
« Les recherches à ce sujet tendent à montrer que la confusion télévision-réalité diminue avec l’âge. En grandissant, les enfants adoptent une nouvelle définition de la réalité télévisée : d’abord, ils croient que toute chose diffusée à l’écran plausible dans le monde réel est donc réelle à la télévision. Plus tard, ils croient que ce qu’ils voient à la télévision représente quelque chose qui peut se passer dans le monde réel. » 7.
« Vers cinq ans, dans sa période la plus individualiste, l’enfant manifeste sa volonté de faire réapparaître ce qu’il sait déjà (…). Conscient de son autonomie, l’enfant sait qu’il suffit d’appuyer sur le bouton du magnétoscope pour animer l’écran de la télévision … et revoir, pour la énième fois, son dessin animé préféré. » 8
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À SEPT ANS
« Vers sept ans (l’âge de raison), les représentations imaginaires et les vécus socialisés sont liés si le développement de l’enfant s’est fait de façon harmonieuse.
L’effet télévision prend des formes diverses selon l’âge : attraction pour tout ce qui bouge, appréhension, rejet, crainte, voire peur panique. Lorsque les images sont trop rapides ou trop bruyantes, par exemple. La présence des parents et leurs choix du spectacle offrent aux jeunes spectateurs un moyen efficace de maîtriser leurs émotions autrement que par la fuite ou une explosion de colère. Il s’agit pour l’accompagnateur d’être un transformateur d’émotions, de faire en sorte que l’enfant retrouve le sentiment de sécurité devenu défaillant. » 9.
« L’enfant qui entre dans la période d’apprentissage va substituer à la « rivalité-jalousie » la compétition dans la course aux connaissances nouvelles. (…) Qu’il soit garçon ou fille, l’enfant dit de la latence (période de la scolarité primaire) cherche la reconnaissance nécessaire pour pouvoir attendre le moment où il sera « pour de vrai » comme papa ou comme maman. Contrairement à une idée reçue, sa vie imaginaire ne se met pas en repos. Elle se transforme, utilise davantage les éléments de la réalité. » 10.
Mais l’âge ne fait pas votre enfant, prenez le temps de regarder comment il réagit à ce que vous lui montrez…
« Âge social, âge du développement. Lorsque les deux correspondent, l’enfant le révèle spontanément. Le contraire aussi, d’ailleurs. Son comportement, des hésitations, un manque d’aisance à s’exprimer traduisent des difficultés ou des émotions enfouies qu’il ne peut extérioriser. Tous ces indices ont un sens. Mais encore convient-il de savoir observer. De l’écouter.
Prenons l’exemple du jeune spectateur qui sort du cinéma et reste muet sur le dessin animé qu’il vient de voir. Plusieurs cas de figure se présentent :
– Il ne dit rien, mais ne présente pas dans son attitude de changement notoire : le film a été vécu comme un moment entre parenthèses et n’a provoqué ni émotion forte ni besoin de questionner ;
– Il est très excité ou au contraire taciturne : l’impact a été trop important pour être formulé par des mots et l’expression corporelle – agitation ou repli – doit d’abord soulager la tension. Les mots viendront ensuite, au cours d’une conversation avec un adulte qui saura l’écouter, le laisser parler et répondre à ses questions.
– L’attention portée à un enfant repose autant sur l’observation que sur l’écoute. Ses gestes, ses mimiques d’intérêt ou d’agacement voire sa passivité durant les émissions qu’il suit fidèlement ont de l’importance – tout comme ses paroles et la façon de les prononcer. Ses critiques en matière de films ou de dessins animés sont presque souvent tranchées dans un premier temps : il aime ou il n’aime pas. Puis les questions, les remarques, parfois énoncées avec légèreté mais de façon inattendue, nous alertent par l’étonnement qu’elles provoquent en nous. » 11.
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LA LINÉARITÉ
En grandissant, l’enfant réussit à lier les différentes séquences d’un film. Les touts petits n’ont pas une perception globale des films que nous leur présentons.
On présente un film à des enfants, puis on leur montre des images tirées du film
« Dès l’âge de 6 ans, les enfants sont capables de classer correctement quatre photos et tous réussissent après 7 ans, ce qui signifie qu’ils ont acquis la compréhension générale de la séquence filmée. Par contre, il faudra attendre 9 ans pour classer correctement la série de neuf photos qui précisent certains détails et 10 ans pour que le même résultat soit obtenu à parti du récit verbal. Ainsi, il apparaît que la lecture du schéma central de l’action est acquise en premier, car le dynamisme des images entraîne le dynamisme intellectuel de l’enfant. Le film présente un matériel concret et visuel auquel l’enfant participe activement, comme s’il le vivait lui-même. Et la séquence présentée est un support, une matrice fortement structurée L’enfant n’a pas besoin de l’interpréter les images, il se content de suivre leur trame temporelle comme il le ferait pour une action concrète. Mais même s’il participe activement au spectacle, l’enfant ne comprend pas d’emblée les enchaînements de l’histoire que raconte le film. Autrement dit, il n’acquiert que plus tardivement la compréhension narrative, la diégèse. » 12.
………………………. Les différentes séquences ne sont pas toujours bien comprises par l’enfant. Pour un jeune téléspectateur, les deux personnages qui observent quelque chose ne seront pas forcément liés à ce qui se passe avec Yogi.
« Certains des éléments qu’un téléspectateur doit décoder sont visuels, produits par des techniques comme la coupure d’un plan au suivent, le déplacement panoramique de la caméra d’une extrémité de la scène à l’autre le zoom permettant de passer d’un plan éloigné au gros pan. La fragmentation de l’écran. D’autres éléments sont auditifs, comme la narration off ou les rires enregistrés. Chacune de ces techniques st une forme de représentation symbolique, c’est-à-dire que chaque technique a une signification dans la réalité. Par exemple, lorsque la caméra fait un zoom sur un détail, cela indique une relation entre ce détail et le contexte plus large. Une simple coupure signifie généralement un changement de point de vue dans une scène donnée. Un fondu enchaîné signifie un changement de scène ou un changement temporel. La segmentation de l’écran dénote un acte de comparaison. Le recours à un narrateur off implique que le personnage qui raconte l’histoire a une certaine distance, soit physique, soit psychologique avec la scène décrite. Des conventions symboliques telles que celle-là, considérées ensemble, constituent un code que le spectateur doit connaître pour comprendre ce qui se passe sur l’écran (Rice, Huston et Wright, 1982).
Une des raisons pour laquelle les enfants font parfois des interprétations erronées d’un film est qu’ils ne savent pas toujours interpréter les relations entre les plans. (Un plan est une séquence au cours de laquelle la caméra tourne sans arrêt). Ces relations véhiculent généralement l’information relative à l’espace et au temps (…)
L’aptitude à comprendre ce type de relation dépend en partie du niveau de développement de l’enfant. Il a été démontré que les enfants ne peuvent pas inférer correctement les relations entre les scènes de programmes conçus pour les téléspectateurs adultes avant un âge supérieur à 7 ans. Les enfants plus jeunes ont tendance à traiter chaque plan comme une entité indépendante. Beaucoup de jeunes enfants n’utilisent même pas l’ordre entre les plans pour interpréter une dramatique ; ainsi leurs souvenirs du programme sont très fragmentaires (Collins, 1982). » 13.
Pour ceux qui veulent continuer en vidéo, ici, Bernard Stiegler, philosophe, va vous parler du développement de l’humain.
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1. « Psychanalyse des dessins animés ». Geneviève Djénati. L’Archipel, Paris, 2001 p. 103
2. « Psychanalyse des dessins animés ». Geneviève Djénati. L’Archipel, Paris, 2001 p. 70
3. « Psychanalyse des dessins animés ». Geneviève Djénati. L’Archipel, Paris, 2001 p.102
4. « Psychanalyse des dessins animés ». Geneviève Djénati. L’Archipel, Paris, 2001 p.149
5. « L’enfant au siècle des images ». Claude Allard. Albin Michel, Paris, 2000 p.209
6. « L’enfant au siècle des images ». Claude Allard. Albin Michel, Paris, 2000 p.83
7. « Animisme chez l’enfant: la capacité de l’enfant à distinguer la réalité de la fiction dans les dessins animés de Walt Disney ». S. Clerc Fribourg: Université de Fribourg. 1998 p.35
8. « Psychanalyse des dessins animés ». Geneviève Djénati. L’Archipel, Paris, 2001p.118
9. « Psychanalyse des dessins animés ». Geneviève Djénati. L’Archipel, Paris, 2001
10. « Psychanalyse des dessins animés ». Geneviève Djénati. L’Archipel, Paris, 2001p.83
11. « Psychanalyse des dessins animés ». Geneviève Djénati. L’Archipel, Paris, 2001p.123
12. « L’enfant au siècle des images ». Claude Allard édition Albin Michel 2000 p.72
13. « L’enfant et les médias ». Patricia M. Greenfield – Jean Retschitzki. Editions universitaires Fribourg Suisse, 1988 p. 22